LAPI : le Sénat adopte un texte pour élargir leur usage et allonger la conservation des données

LAPI : le Sénat adopte un texte pour élargir leur usage et allonger la conservation des données

Seb 19 déc. 2025 5 min de lecture 1 249 vues
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Le Sénat a adopté, le 17 décembre 2025, en première lecture et avec modifications, une proposition de loi visant à assouplir les contraintes encadrant l’usage des dispositifs de lecture automatisée de plaques d’immatriculation (LAPI) et à sécuriser l’action des forces de l’ordre. Le texte doit désormais être examiné par l’Assemblée nationale.


Des outils déjà utilisés, mais jugés insuffisamment exploitables

Les dispositifs LAPI reposent sur des appareils fixes ou mobiles permettant l’enregistrement des flux de circulation routière et la capture d’images de véhicules, ainsi que de leurs occupants.

À ce stade, leur mise en œuvre est strictement encadrée, tant par la liste limitative des infractions concernées que par des délais de conservation des données jugés courts par les forces de sécurité. Selon l’exposé des motifs du texte, ces contraintes constituent un frein opérationnel, dans un contexte marqué par la multiplication des enquêtes complexes et par des moyens humains et techniques contraints.


Un élargissement ciblé des infractions concernées

La proposition de loi modifie l’article L233-1 du code de la sécurité intérieure, qui fixe les infractions autorisant le recours aux dispositifs LAPI. Les infractions déjà prévues demeurent inchangées. Il s’agit notamment :

  • des actes de terrorisme ;
  • de certains crimes et délits graves, tels que les meurtres en bande organisée, les actes de torture ou de barbarie, la traite des êtres humains, le proxénétisme, les viols commis en concours ou encore le trafic de stupéfiants ;
  • du vol et du recel de véhicules volés ;
  • de la contrebande, de l’importation ou de l’exportation en bande organisée et du blanchiment douanier.

À cette liste, le texte adopté ajoute plusieurs infractions supplémentaires, parmi lesquelles :

  • le vol et le recel aggravés, notamment lorsqu’ils sont commis par plusieurs personnes ;
  • l’escroquerie ;
  • l’évasion réalisée par violence, effraction ou corruption ;
  • la soustraction de mineurs ;
  • l’aide à l’entrée et au séjour irréguliers de personnes étrangères.

Les dispositifs LAPI pourront également être mobilisés à des fins de prévention, pour anticiper la commission d’actes de terrorisme ou préserver temporairement l’ordre public, notamment lors d’événements particuliers ou de grands rassemblements.


Le maintien d’une liste fermée, au détriment d’un seuil de gravité

Le texte initial envisageait de remplacer la liste exhaustive des infractions par un critère de gravité, fondé sur une peine encourue d’au moins cinq ans d’emprisonnement. Cette option n’a finalement pas été retenue par les députés, en raison des enjeux liés au respect de la vie privée et des craintes d’un recours jugé excessif ou disproportionné aux dispositifs automatisés.

Le choix s’est donc porté sur un élargissement encadré, conservant une liste précise d’infractions ouvrant droit à l’utilisation des LAPI.


Des délais de conservation et d’accès aux données significativement allongés

Autre évolution majeure : l’extension du délai maximal de conservation des données collectées par les traitements automatisés, désormais porté à un an.

Le texte précise également les conditions d’accès aux données ayant fait l’objet d’un rapprochement positif, c’est-à-dire correspondant aux informations issues des fichiers de police, de douane ou du système d’information Schengen. La police nationale, la gendarmerie nationale et les douanes pourront accéder à ces données dans un délai maximal d’un mois pour les enquêtes de courte durée.

Dans le cadre d’enquêtes judiciaires ou d’instructions plus longues, portant sur l’une des infractions listées à l’article L233-1 du code de la sécurité intérieure, l’accès pourra être étendu jusqu’à un an. Dans ce cas, une autorisation préalable du juge sera requise.

L’accès aux données est également ouvert aux services de police et de gendarmerie nationale pour les besoins de la prévention et de la répression des actes de terrorisme.

Ce dispositif va au-delà du texte initial, qui prévoyait des délais plus restreints. L’objectif affiché est d’adapter la conservation des données à la réalité opérationnelle des enquêtes, susceptibles de s’inscrire dans le temps long.


Un cadre contractuel pour le partage des données LAPI

La proposition de loi introduit par ailleurs un mécanisme de contractualisation pour le partage des données issues des dispositifs de contrôle automatisé. Les autorités publiques compétentes pourront conclure des conventions avec la police nationale, la gendarmerie nationale et les douanes afin de permettre :

  • le partage des données collectées par des dispositifs LAPI intégrés à des systèmes de vidéoprotection sur la voie publique ;
  • l’identification des caméras susceptibles d’être équipées de tels dispositifs.

Les modalités précises seront définies par décret en Conseil d’État.

Initialement, le texte envisageait une généralisation obligatoire de l’intégration des dispositifs LAPI sur les caméras de vidéoprotection à compter de 2028. Cette orientation a été abandonnée au profit d’une approche contractuelle, afin de respecter le principe de libre administration des collectivités territoriales.


Une suite parlementaire encore attendue

Adoptée par le Sénat avec modifications, la proposition de loi doit désormais être examinée par l’Assemblée nationale. Les débats à venir détermineront si les équilibres retenus entre efficacité opérationnelle, encadrement juridique et protection des libertés individuelles seront confirmés ou ajustés.

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